(2/11/2006)
AUTOUR DE L’INCENDIE D’UN BUS MARSEILLAIS
L’attaque barbare d’un autobus par trois jeunes, samedi 28 octobre à Marseille, dans lequel une étudiante marseillaise d’origine sénégalaise a été grièvement brûlée, provoque l’émotion en France.
Qualifié de « vrai guet-apens » par le procureur de la République, Jacques Beaume, l’incendie suscite de vives inquiétudes parmi la population française. Comme une réaction naturelle, l’opinion publique relie, tout de suite, cet incident à Marseille aux événements antérieurs des violences urbaines, en particulier aux émeutes récentes dans les banlieues françaises. On établit un rappel chronologique très douloureux des incidents qui se sont produits en moins d’un an et qui donc témoignent d’une tendance de fond plus qu’inquiétante : les violences n’ont cessé de croître depuis dix ans.
Les enquêtes sont encore en cours et, selon toute probabilité, les enquêteurs pourront arriver à la conclusion que l’incendie constitue « un acte isolé » et que la situation à Marseille reste globalement calme. Mais pour des pessimistes, l’attaque de samedi soir équivaut déjà à un acte qui a mis fin à l’exception marseillaise- une ville longtemps épargnée par les flambées de violences urbaines.
Une telle réaction fait, sans doute, preuve de la présence de retombées considérables des violences urbaines précédentes. L’inquiétude d’une recrudescence des violences semble être devenue une obsession permanente chez une partie de la population française et chez leurs autorités. En effet, après les émeutes en banlieue de l’année dernière, le gouvernement français a juré d’aborder ce qu’il considère comme les racines du mal, à savoir le chômage, la discrimination et la pauvreté dans des faubourgs, dont des quartiers des immigrés. Mais des critiques se plaignent que les politiciens français n’aient pas assez fait et que la situation n’ait guère changé depuis. Il y a des signes de retour des violences dans nombre de banlieues et villes. On a peur que l’incident marseillais, à moins d’être bien contrôlé, ne puisse devenir la goutte qui fait déborder le vase !
Essentiellement, les violences urbaines en France, y compris, peut-être, de l’incendie récent à Marseille, prennent racine dans de questions plus supra- structurelles. Par exemple, de nombreux économistes ont reconnu depuis plus d’une décennie qu’un SMIC trop généreux, couplé de d’autres rigidités dans le marché du travail (e.g. les horaires de travail), a amené à un taux de chômage qui est resté obstinément haut depuis le début des années 1990. En même temps, un système également généreux de bien-être avec l’éducation gratuite, des soins médicaux gratuits, et des allocations d’alimentation, etc. joue un rôle clé en attirant ceux qui n’ont pas nécessairement besoin de travail. Un tel régime socio-économique peut bien contenir l’embryon d’un malaise social. Et quand les autorités doivent faire face à ce dernier, ils ont du mal à mobiliser efficacement la police qui s’avère d’être excellente en répression mais ne pas l’être en prévention…
Comme ce sont des problèmes structurels, on ne peut pas trouver une solution du jour au lendemain. D’ailleurs, les émeutes en banlieue et les violences urbaines sont devenues depuis longtemps un syndrome français qui est lié aux valeurs de la démocratie française. Même si on pouvait trouver un remède à ce malaise, le pays porte toujours la cicatrice de son passé violent. Une récurrence du malaise pourrait aussi être prévenue si elle trouve des conditions favorables qui comprennent, parmi d’autres, des calculs politiques et la manipulation de l’information par les médias. A quelques mois de la présidentielle, qui pourrait prétendre que l’incident de samedi 28 octobre à Marseille n’a pas pris une tournure politique ? Et qui oserait conclure que les médias n’ont pas « attisé des braises » dans cet incident marseillais épouvantable ?
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